Je vous remercie, Monsieur le Président Ruto, d'accueillir ce sommet africain et de jouer un rôle mobilisateur dans l'action climatique depuis votre entrée en fonction. À cet égard, je me félicite de la loi kényane de 2023 sur le changement climatique qui a été promulguée au cours de ce sommet et qui met fortement l'accent sur les marchés du carbone. Nous vous soutenons pleinement sur ce sujet important.
Mesdames et Messieurs les Présidents et les Premiers ministres,
Mesdames et Messieurs,
Chers collègues,
Je suis très honorée de participer à cette discussion. Ce sommet est une étape cruciale dans la préparation de la prochaine réunion de la COP28 à Dubaï, afin que la voix de l'Afrique soit entendue et que les priorités de l'Afrique - un continent très touché par le changement climatique -, soient dûment prises en compte. Aujourd'hui je suis là non seulement pour vous écouter, mais aussi pour vous présenter l'offre que l'Europe vous fait d'être à vos côtés lors de la COP28 et pour travailler ensemble sur toutes les questions à l'ordre du jour. Car, aussi différents que puissent paraître nos deux continents, nous partageons les mêmes intérêts lorsqu'il s'agit de l'action pour le climat. Nous vous entendons bien, cher Président Ruto et chers amis, lorsque vous dites que la priorité de l'Afrique est de développer votre économie et de sortir le plus grand nombre possible de personnes de la pauvreté. Et oui, l'action pour le climat fait partie de la solution. Vous faites partie de la solution : avec votre énorme potentiel d'énergies renouvelables et d‘hydrogène propre, vos matières premières critiques, votre nature et votre biodiversité incroyables, et votre main-d'œuvre jeune, vous pouvez contribuer à assainir le système énergétique mondial et les chaînes d'approvisionnement, tout en créant les perspectives favorables que réclament vos citoyens en matière d'emploi et d'économie. Il s'agit d'un partenariat gagnant-gagnant qui présente des avantages pour l'Afrique, pour l'Europe et pour le monde. Par exemple, les avantages de l'expansion du secteur africain de l'énergie propre seraient énormes. En accélérant la transition vers les énergies solaire et éolienne, les emplois dans le secteur de l'énergie en Afrique pourraient doubler d'ici à 2030. Et l'Afrique pourrait produire suffisamment d'énergie propre non seulement pour alimenter votre continent, mais aussi pour l'exportation. L'action climatique peut devenir un facteur majeur de croissance en Afrique.
Mais pour cela, l'Afrique a besoin d'investissements massifs. Et l'Europe veut être votre partenaire pour vous aider à combler le déficit d'investissements. C'est pourquoi la moitié de Global Gateway, notre plan d'investissement de 300 milliards d'euros, est destinée au continent africain. Global Gateway soutient des investissements allant de centrales hydroéléctriques en RDC, au Burundi, au Rwanda et en Tanzanie, à l'initiative d'un milliard d'euros sur l'adaptation et la résilience de l'Afrique au changement climatique que nous avons annoncée à la COP27. Global Gateway n'a pas son pareil dans l'environnement mondial des investissements. Nous n'avons pas pour seul intérêt l'extraction de ressources. Nous voulons être votre partenaire dans la création de chaînes de valeur locales sur le sol africain. Nous voulons partager la technologie européenne avec vous. Nous voulons investir dans les compétences de la main-d'œuvre locale. Parce que plus vous serez forts en tant que fournisseurs, plus l'Europe pourra diversifier ses chaînes d'approvisionnement en direction de l'Afrique, et plus nous serons en mesure de réduire le risque sur nos économies. La Namibie, par exemple, est en train de mettre sur pied un nouveau secteur de l'hydrogène, ainsi qu'une chaîne de valeur des matières premières, en partenariat avec l'Europe. Et tout à l'heure, le Président Ruto et moi-même signerons un nouveau partenariat pour l'hydrogène entre le Kenya et l'Union européenne visant à développer davantage l'économie de l'hydrogène vert, avec le plein soutien de l'Équipe Europe. Voilà une bonne nouvelle pour l'Afrique comme pour l'Europe.
Cependant, si cruciaux soient-ils, les fonds publics accordés par les grandes économies ne suffiront pas. C'est pourquoi nous devons porter sur la scène mondiale, à la COP28, la discussion sur le financement de l'action climatique. Permettez-moi d'évoquer brièvement trois points précis qui seront discutés ici, à Nairobi, en préparation de la COP28. Premièrement, sur la manière d'attirer les investissements privés en faveur de l'Afrique. Deuxièmement, sur la tarification du carbone. Et troisièmement, sur la fixation d'objectifs mondiaux pour la transition énergétique.
Sur le premier point : la transition écologique requerra des investissements d'une ampleur sans précédent. Les financements publics ne suffiront pas. C'est vrai pour l'Europe ; ça l'est tout autant pour les marchés émergents et les économies en développement. Il faudra mobiliser massivement des fonds privés. Et c'est là qu'interviennent les obligations vertes, dont il est largement reconnu qu'elles peuvent apporter une partie de la solution. C'est la raison pour laquelle nous venons de présenter une nouvelle proposition, l'initiative mondiale en matière d'obligations vertes, pour attirer les investissements privés. Nous savons que les économies émergentes ont parfois des difficultés à accéder aux marchés des capitaux. Mais nous pouvons changer cet état de fait. L'Europe dispose du marché des obligations vertes le plus grand et le plus avancé au monde. Nous sommes disposés à partager notre expertise avec vos équipes pour vous aider à développer vos propres marchés d'obligations vertes. Et dans le même temps, nous allons pousser du côté des investisseurs. Avec la Banque européenne d'investissement et nos États membres, nous allouons un milliard d'euros pour réduire le risque sur les investissements privés dans les marchés émergents. Cette action pourrait permettre d'attirer jusqu'à 20 milliards d'euros d'investissements durables. Travaillons ensemble à construire et à faire prospérer les marchés africains des obligations vertes. Et abordons ensemble ce point crucial à la COP28.
Il existe une autre solution qui permettrait de dégager d'immenses ressources pour l'action climatique en Afrique. Il s'agit de la tarification du carbone – et ce sera l'objet de mon deuxième point. Je suis persuadée – tout comme vous, Monsieur le Président Ruto – que la tarification des émissions de carbone est l'un des outils les plus rentables et les plus efficaces dont nous disposions. En effet, elle permet de stimuler l'innovation dans le secteur privé. De faire payer un juste prix aux gros pollueurs. Et d'utiliser les recettes ainsi obtenues pour soutenir la transition vers une énergie propre dans les pays en développement. Nous reviendrons plus en détail sur ce point lors de la prochaine session. Travaillons ensemble pour soumettre une proposition de tarification mondiale du carbone à la COP28.
Enfin, en ce qui concerne les objectifs énergétiques mondiaux. Si nous voulons limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, nous devons accélérer la transition énergétique mondiale. Concrètement, cela signifie multiplier par trois les capacités en matière d'énergies renouvelables et par deux l'efficacité énergétique d'ici à 2030. C'est à notre portée. Si nous intensifions les investissements à l'échelle mondiale dans les énergies renouvelables, l'énergie propre deviendra plus abordable pour tous les pays, y compris les pays africains. C'est pourquoi le président de la COP28, M. Sultan Al Jaber, et moi-même militons en faveur d'objectifs mondiaux dans le domaine de la transition énergétique, à atteindre collectivement. Des objectifs mondiaux serviront de points de repère pour suivre les progrès accomplis et attirer encore davantage d'investissements privés. Je me réjouis donc à la perspective de travailler avec vous sur ces questions. Et j'espère que l'Afrique et l'Europe uniront leurs forces pour parvenir à un accord international à la COP28.
Mesdames et Messieurs,
Excellences,
Ces trois propositions vous sembleront peut-être audacieuses, voire impossibles à concrétiser. Mais, pour reprendre les mots de Nelson Mandela, « Cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse ». Il y va de notre responsabilité de lutter contre le réchauffement climatique pour le bien de nos enfants et de nos petits-enfants. Faisons cause commune dans cet esprit.
Je vous remercie infiniment.
Détails
- Date de publication
- 5 septembre 2023
- Auteur
- Représentation en France