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Représentation en France
Article d’actualité10 avril 2019Représentation en France

Glyphosate, pesticides : l’Europe nous empoisonne ! Vraiment ?

L’Europe dispose du système d’autorisation des pesticides le plus strict au monde. Il fonctionne en deux étapes. L’Union évalue d’abord les substances qui entrent dans la composition des pesticides, puis les autorise ou les interdit au niveau européen. Depuis 25 ans, plus de 700 substances ont été interdites pour protéger la santé des Européens ! Si une substance est autorisée au niveau européen, les États membres restent libres d’interdire sa commercialisation et/ou d’encadrer son usage sur leur territoire. Le droit européen encourage par ailleurs une utilisation soutenable des pesticides, en interdisant par exemple l’épandage aérien, et favorise les substances avec un moindre impact sur l’environnement. La Commission européenne vient par ailleurs de proposer de réduire significativement l’usage des pesticides chimiques en Europe.  

 

Eriksgården, Sjöbo, Sweden

 

Un processus d’autorisation des substances actives strict, rigoureux et transparent…

Avant d’être approuvée dans l’Union européenne, une substance active qui entre dans la composition d’un pesticide doit passer par une procédure d’évaluation scientifique extrêmement rigoureuse. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) – en coopération avec les autorités compétentes de tous les États membres – passe en revue toutes les études scientifiques disponibles avant de donner son avis à la Commission européenne. 

Celle-ci présente ensuite aux États membres une proposition d’interdiction ou d’approbation de cette substance, accompagnée si nécessaire de recommandations concernant la gestion des risques, comme par exemple l’interdiction de pulvérisation aérienne à proximité de rivières. Les États membres sont ensuite invités à voter sur la proposition de la Commission européenne. Ce système est considéré comme un des plus stricts au monde, si pas le plus strict. 

 

… dont la transparence a encore été renforcée 

Suite aux demandes formulées dans le cadre d’une initiative citoyenne européenne1 et convaincue qu’une transparence accrue de l’indépendance des évaluations scientifiques est nécessaire pour asseoir la confiance des citoyens, la Commission a proposé d’améliorer la transparence et la qualité du processus d’évaluation des substances actives. Elle est en effet convaincue qu’une transparence accrue de l’indépendance des évaluations scientifiques est nécessaire pour asseoir la confiance des citoyens. 

Ces nouvelles règles ont été approuvées et adoptées par le Parlement européen et les États membres en 2019. 

Selon ces nouvelles règles, les industriels doivent déclarer toutes les études commandées en soutien à leur demande d’autorisation ou de renouvellement. Les citoyens auront automatiquement accès à toutes les études. La Commission peut demander à l’EFSA de procéder à des études destinées à contrevérifier des éléments fournis à l’appui des demandes d’autorisation ou de renouvellement. 

 

…qui laisse in fine les États membres libres d’encadrer, voire d’interdire, l’usage des pesticides sur leur territoire 

Une substance non autorisée au niveau européen ne peut pas être commercialisée, ni utilisée, dans les États membres. En revanche, si une substance est autorisée au niveau européen, un État membre peut toujours restreindre ou même interdire sa commercialisation s’il établit, par exemple, la dangerosité d’un co-formulant dans le produit final. 

 

Pourquoi la Commission n’a-t-elle pas interdit le glyphosate ? 

Comme c’est le cas pour toutes les substances, une évaluation scientifique complète du profil toxicologique du glyphosate a été effectuée. Toutes les études scientifiques existantes – y compris celles qui n’émanaient pas de l’industrie – ont été prises en compte, tout comme l’avis des autorités nationales. 

L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a rendu ses conclusions en 2015 et le comité d’évaluation des risques de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a ensuite confirmé en 2017 – par consensus des experts nationaux des 27 États membres – que la substance active ne pouvait pas être classée comme cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction. 

Dès lors, en l’absence de risque avéré pour la santé de ladite substance, la Commission a proposé le renouvellement de la licence du glyphosate pour 5 ans. Les États membres de l’Union européenne ont approuvé cette proposition de renouvellement le 27 novembre 2017 (18 ayant voté en faveur, 9 contre, et 1 s’étant abstenu). Actuellement, l’utilisation du glyphosate est autorisée jusqu’au 15 décembre 2022. 

Une demande de renouvellement de la licence du glyphosate au-delà de 2022 a été introduite en décembre 2019. En conséquence, la Commission européenne a chargé le Groupe d’évaluation du glyphosate (AGG), composé de 4 Etats membres (France, Hongrie, Pays-Bas et Suède) agissant conjointement en tant que rapporteurs, de mener à bien la prochaine évaluation du glyphosate. 

Le 15 juin 2021, l’AGG a transmis son rapport d’évaluation à l’EFSA et l’ECHA, lequel va clairement dans le sens d’un renouvellement de l’autorisation du glyphosate, en raison du strict respect des critères édictés par les textes européens. Le 23 septembre 2021, l'EFSA et l'ECHA ont lancé des consultations publiques sur les rapports remis par l'AGG, qui se sont terminées le 22 novembre 2021.  

Le processus se poursuit en 2022 avec l’examen des 368 contributions reçues lors de la consultation publique, ainsi que des quelques 2 400 commentaires provenant d’experts des Etats membres.  

Ainsi, l’EFSA rendra ses conclusions à la Commission européenne et aux Etats membres d’ici mi-2023, et ces derniers se prononceront pour un renouvellement ou non de la licence du glyphosate.  

Pourquoi l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont-elles considéré que le glyphosate n’est pas cancérigène alors qu’un autre organisme dit le contraire ? 

Il s’agit là d’une divergence d’opinions scientifiques. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le glyphosate en « cancérigène probable » en 2015, ce qui n’est pas le cas des agences européennes, sur la base des évaluations scientifiques actuelles.  

Les agences européennes, les autorités nationales des États membres de l’UE, du Canada, du Japon, d’Australie, de la Nouvelle-Zélande, ainsi que des experts de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture et de l’Organisation mondiale de la santé sont parvenus à la même conclusion. 

 

Comment l’Europe réduit-elle le nombre de pesticides utilisés et contrôle-t-elle leur usage ? 

La législation européenne a permis de réduire considérablement le nombre de substances actives autorisées dans l’Union puisque 700 d’entre elles ont été retirées depuis 25 ans. Ainsi, l’utilisation de trois néonicotinoïdes ayant des conséquences néfastes sur les abeilles est totalement interdite depuis 2018 en dehors des espaces fermés, comme les serres. 

L’UE encourage une utilisation soutenable des pesticides, par exemple en recommandant d’interdire la pulvérisation aérienne des cultures ou les épandages à proximité immédiate des zones résidentielles. Chaque année, l’UE établit un état des lieux des résidus de pesticides présents dans les produits alimentaires. 53% des aliments consommés par les Européens sont totalement exempts de tout résidu de pesticide. Lorsque des résidus persistent, dans 98% des cas, ils sont conformes aux normes de sécurité. Les produits non conformes sont immédiatement retirés du marché

La stratégie de la Commission européenne est claire : adopter des règles strictes pour limiter l’usage des pesticides chimiques mais aussi pour assurer un niveau de sécurité alimentaire harmonisé et sain dans toute l’Union européenne.  

Elle a adopté le 22 juin 2022 une proposition législative dans ce but, conciliant deux de ses priorités en matière d’environnement : le Pacte Vert et la stratégie de “De la ferme à la table”. Cette proposition fait écho au rapport de la conférence sur l’avenir de l’Europe qui s’est achevée le 9 mai 2022 et dont les citoyens ont expressément demandé à l’UE de se pencher sur l’utilisation des pesticides et le risque qu’elle entraîne. Cela vient aussi relever le niveau d’ambition de l’Union européenne, afin de garantir une sécurité alimentaire durable, tout en protégeant notre santé. Concrètement, la Commission européenne souhaite mettre en place :  

  • Des règles claires et contraignantes, parmi lesquelles des objectifs juridiquement contraignants au niveau de l'UE et au niveau national visant une réduction de 50% de l’utilisation des pesticides chimiques d’ici à 2030, et les risques qui y sont associés ainsi que l'utilisation des pesticides les plus dangereux ; 

  • Des nouvelles règles strictes en matière de lutte contre les organismes nuisibles, respectueuses de l'environnement ; 

  • Une interdiction de tous les pesticides dans des lieux tels que les espaces verts urbains, y compris les parcs ou jardins publics, les terrains de jeux, les terrains de loisirs ou de sport et d’autres zones sensibles. 

Afin d’atteindre ces objectifs, la Commission propose de remplacer la directive existante avec un règlement qui sera directement applicable dans tous les Etats membres. Cela créera de fait une obligation de moyens, en favorisant la lutte contre les pesticides qui était jusque-là déficiente et inégale, ainsi qu’une obligation de résultats, puisque des rapports annuels devront être transmis par les Etats membres sur l’état de mise en œuvre des nouvelles règles. 

 

Comment l’Europe accompagne-t-elle les agriculteurs dans la transition vers moins de pesticides ? 

La nouvelle proposition de la Commission pour la réduction de l’utilisation des pesticides chimiques, est assortie de compensations pour les agriculteurs, afin de les soutenir dans cette transition vers des systèmes de production alimentaire plus durables. Les producteurs agricoles bénéficieront notamment :  

  • D’une compensation pour tous les coûts liés à la mise en œuvre des nouvelles règles pendant une période de transition de 5 ans ; 

  • De mesures renforcées pour garantir des alternatives biologiques aux pesticides et amoindrir les risques sanitaires ; 

  • D’un appui du programme Horizon qui soutiendra les projets de recherche et développement et favorisera l’agriculture de précision ; 

  • D’un plan d’action biologique pour atteindre les objectifs en matière de pesticides de la stratégie “De la ferme à la table”.

 

Une ambition qui dépasse les frontières européennes 

La Commission veut s’assurer d’avoir aussi un impact au-delà des 27 et être précurseur dans le respect des normes environnementales mondiales. Les marchandises importées provenant des pays tiers devraient donc, à terme, être limitées, voire interdites, si elles ne respectent pas la teneur maximale en résidus. 

L’objectif sera de réduire l’utilisation des pesticides à l’intérieur de l’UE, tel que des résidus de thiaméthoxame et de clothianidine, et d’encourager les pays tiers, importateurs de denrées contenant ces substances, à abandonner cette utilisation en interdisant leur commercialisation à l’intérieur de nos frontières.  

 

  

Plus d’informations 

  •  

1 « Interdire le glyphosate et protéger la population et l’environnement contre les pesticides toxiques » 

Détails

Date de publication
10 avril 2019 (Dernière mise à jour: 12 juillet 2022)
Auteur
Représentation en France