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Représentation en France
  • Article d’actualité
  • 7 décembre 2022
  • Représentation en France
  • 5 min de lecture

L'UE demande deux groupes spéciaux de l'OMC dans des différends l'opposant à la Chine

L'UE a demandé aujourd'hui la constitution de groupes spéciaux au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour deux de ses différends commerciaux en cours avec la Chine.

Visit of Karel De Gucht, Member of the EC, to the WTO

L'UE a demandé aujourd'hui la constitution de groupes spéciaux au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour deux de ses différends commerciaux en cours avec la Chine. L'un concerne la légalité des restrictions commerciales mises en place depuis décembre 2021 par la Chine à l'égard des exportations lituaniennes et des exportations de l'UE intégrant des composants lituaniens. L'autre concerne la légalité des mesures chinoises empêchant les titulaires de brevets de haute technologie de l'UE d'avoir recours aux juridictions de l'UE pour protéger et faire respecter efficacement leurs droits.

Dans les deux cas, les mesures chinoises nuisent fortement aux entreprises européennes. En outre, les mesures discriminatoires prises par la Chine à l'égard de la Lituanie affectent le commerce intra-UE et les chaînes d'approvisionnement intra-UE et ont une incidence sur le fonctionnement du marché intérieur de l'UE, notamment en imposant des ajustements du marché. La suppression de ces mesures est dans l'intérêt tant économique que stratégique de l'UE.

Les mesures prises par la Chine ont réduit de 80 % les échanges commerciaux de la Lituanie

Depuis décembre 2021, la Chine applique des mesures discriminatoires et coercitives à l'égard des exportations lituaniennes et des exportations de produits de l'UE intégrant des composants lituaniens. Ces mesures consistent notamment dans le refus d'importations en provenance de Lituanie par les autorités douanières chinoises, dans des restrictions à l'importation frappant des multinationales qui utilisent des intrants en provenance de Lituanie et dans une réduction des exportations chinoises vers la Lituanie.

La Chine a aussi subitement officialisé l'interdiction totale des importations d'alcool, de bœuf, de produits laitiers, de grumes et de tourbe expédiées depuis la Lituanie dans le cadre de la même série de mesures, en avançant des arguments phytosanitaires. Lorsqu'elle a été invitée à fournir des explications complémentaires, la Chine n'a pas démontré que ces interdictions étaient justifiées. Les statistiques douanières chinoises indiquent que le commerce entre la Lituanie et la Chine a chuté de 80 % entre janvier et octobre 2022 par rapport à l'année précédente.

En demandant la constitution d'un groupe spécial de l'OMC, l'UE protège ses États membres contre les mesures discriminatoires chinoises, qu'elle estime contraires aux règles de l'OMC.

Les «anti-suit injunctions» de la Chine restreignent la liberté d'action des titulaires de brevets de haute technologie

Depuis août 2020, les tribunaux chinois rendent des décisions — appelées «anti-suit injunctions» — qui empêchent les entreprises titulaires de brevets de haute technologie (les «brevets essentiels à des normes») de protéger efficacement leurs technologies devant les juridictions non chinoises, y compris les juridictions de l'UE. Ces «anti-suit injunctions» limitent indûment la capacité des titulaires de brevets de haute technologie, par exemple une société européenne qui possède une technologie de téléphonie mobile, de se tourner vers une juridiction de l'UE pour régler un différend avec un éventuel licencié, par exemple un fabricant chinois de téléphones mobiles, concernant les conditions d'une licence de brevet. La violation de ces «anti-suit injunctions» donne lieu à des amendes pouvant aller jusqu'à 130 000 euros par jour.

Les entreprises européennes détiennent un certain nombre de brevets de haute technologie, ce qui confère à l'UE un avantage technologique. La mesure chinoise prive effectivement les entreprises européennes de haute technologie de la possibilité d'exercer et de faire respecter leurs droits de brevet au sein de l'UE ou de saisir toute autre juridiction en dehors de la Chine. Lorsqu'il est question de droits de brevet de l'UE, ce sont les juridictions de l'UE qui devraient statuer. Pour leur part, les fabricants chinois ont demandé ces injonctions pour faire pression sur les titulaires de droits de brevet et obtenir un accès moins onéreux à la technologie européenne.

L'UE estime que les mesures chinoises sont incompatibles avec l'accord de l'OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Par ces «anti-suit injunctions», la Chine impose unilatéralement des règles au profit de ses propres entreprises, au détriment du système multilatéral de l'OMC de protection des droits de propriété intellectuelle. En demandant la constitution d'un groupe spécial de l'OMC dans cette affaire, l'UE cherche à faire en sorte que son industrie de haute technologie puisse effectivement exercer ses droits de brevet pour protéger les investissements dans l'innovation.

Prochaines étapes

L'organe de règlement des différends (ORD) de l'OMC examinera la demande de l'UE lors de sa prochaine réunion, le 20 décembre 2022. La Chine peut s'opposer une fois à la création d'un groupe spécial. Dans ce cas, l'UE renouvellera sa demande et le groupe spécial sera constitué lors de la réunion de l'ORD du 30 janvier 2023. Les travaux du groupe spécial peuvent durer jusqu'à un an et demi.

DS610: le 27 janvier 2022, l'Union européenne a demandé l'ouverture de consultations avec la Chine. Ces consultations ont eu lieu les 14 et 15 mars 2022.

DS611: le 18 février 2022, l'Union européenne a demandé l'ouverture de consultations avec la Chine. Ces consultations ont eu lieu les 6, 7 et 12 avril 2022.

Déclarations de membres du Collège

La Chine est un partenaire commercial majeur de l’UE, ce qui apporte des avantages économiques évidents aux deux parties. Les bons partenaires se traitent avec respect et devraient appliquer des conditions de concurrence loyales. Il est donc de notre devoir de défendre nos droits lorsque la Chine enfreint les règles du commerce mondial ou soumet un État membre de l’UE à une coercition économique qui a des répercussions sur notre marché unique. Nous aurions préféré résoudre ces deux affaires importantes à caractère systémique dans le cadre d’un processus de consultation, et nous avons consacré un temps considérable à essayer d’y parvenir, mais en vain. Nous n’avons donc pas d’autre choix que de demander la mise en place de ces groupes spéciaux de l’OMC.

Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif chargé du commerce - 07/12/2022

Pour en savoir plus

Informations complètes sur l'affaire DS610 (discrimination chinoise à l'égard des flux commerciaux en provenance de Lituanie)

Demande de constitution d'un groupe spécial dans l'affaire DS610

Informations complètes sur l'affaire DS611 (restrictions chinoises concernant les moyens de faire respecter des brevets de haute technologie)

Demande de constitution d'un groupe spécial dans l'affaire DS611

Diagramme des procédures de l'OMC

Le mécanisme de règlement des différends de l'OMC en bref

Procédures engagées par l'UE dans le cadre de l'OMC

Détails

Date de publication
7 décembre 2022
Auteur
Représentation en France