L’agression armée de la Russie contre l’Ukraine a relancé avec acuité les discussions sur la défense européenne pour renforcer la sécurité des citoyens européens et être en capacité d’agir face aux crises qui éclatent notamment dans le voisinage de l’UE. Ce chantier est déjà en cours : près de 40 missions civiles et opérations militaires lancées depuis 2003 et des avancées importantes ont été réalisées récemment s’agissant de la coopération industrielle en matière de défense mais aussi sur le terrain de la coopération intergouvernementale.
A travers le Fonds européen de défense adopté en 2021 et doté de 7,9 milliards d’euros, le budget de l’UE finance pour la première fois des projets en matière de défense. Parallèlement, les Etats membres ont adopté en mars 2022 pour la première fois une Boussole stratégique, analyse commune des défis et des menaces qui se posent à l’UE, qui renforce la politique de sécurité et de défense commune et la dote notamment d’une capacité de déploiement rapide de 5 000 hommes.
La politique de sécurité et de défense commune avance
Grâce à sa politique de sécurité et de défense commune (PSDC), l’Union européenne agit pour le maintien de la paix, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale. Pour assurer ce rôle, les États membres de l’UE peuvent décider de lancer des missions civiles et des opérations militaires à des fins de maintien de la paix, de la prévention des conflits et du renforcement de la sécurité internationale. Aujourd’hui, les 24 missions et opérations de l’UE se situent principalement en Afrique, au Moyen-Orient mais également en Europe (Arménie, Ukraine, Moldavie). Depuis 2003, une quarantaine de missions et opérations ont été lancées.
Après l'agression militaire de la Russie contre l’Ukraine en février 2022, l’UE a réagi avec force sur le terrain économique au travers de sanctions mais pas seulement. Pour la première fois dans son histoire, l’Union européenne a mobilisé 11,1 milliards d’euros de la Facilité européenne pour la paix pour acheter des armes létales destinées aux forces armées ukrainiennes.
La Boussole stratégique pour renforcer notre politique de sécurité et de défense
La Boussole insiste sur 4 domaines :
- Agir de manière plus rapide et plus résolue lorsque nous sommes confrontés à des crises ;
- Protéger nos citoyens contre des menaces qui évoluent rapidement ;
- Investir dans les capacités et les technologies dont nous avons besoin ;
- Collaborer avec d’autres partenaires stratégiques tels que les Nations Unies, l'OTAN, l'Union africaine, l’OSCE ou l'ASEAN pour atteindre des objectifs communs.
Les États membres s’engagent notamment à développer une capacité de déploiement rapide de l’UE de 5 000 hommes pour répondre à différents types de crises. Les missions civiles sont aussi renforcées, avec la possibilité de déployer 200 experts en moins de 30 jours. La Boussole stratégique prévoit la création d’une boîte à outils hybride pour répondre à un large éventail de menaces de ce type, dont la désinformation et les cyberattaques.
Un fonds européen dédié à la défense
Les États membres ont consacré 240 milliards de dollars à la défense en 2022,soit 1,5 % de leur PIB en moyenne. Dans le contexte de la guerre en Ukraine, l’Allemagne a décidé de doubler son budget de défense, le faisant passer à 200 milliards d’euros par an, soit 2% de son PIB.
Pour répondre à la dispersion des efforts en matière de défense entres les Etats membres, la Commission européenne a proposé un Fonds européen de la défense doté de 7,9 milliards d’euros pour la période 2021-2027. Le Fonds européen de défense complète et renforce les investissements nationaux dans la recherche en matière de défense, le développement de prototypes et l’acquisition d’équipements et de technologies de défense.
Face à l’urgence, favoriser les acquisitions conjointes de défense et accélérer la production de munitions pour l’Ukraine
Au-delà de la phase de recherche et développement, face à la guerre en Ukraine, l’UE a également introduit de nouveaux instruments d’urgence qui contribuent à renforcer la coopération dans le domaine de la défense : (1) un instrument de consolidation de la demande, nommé “EDIRPA”, doté d’un budget de 310 millions d’euros. Ce règlement EDIRPA encourage la coopération entre les États membres en matière de passation de marchés dans le domaine de la défense afin de renforcer la solidarité, d'augmenter l'efficacité des dépenses publiques et de réduire la fragmentation excessive en matière d'acquisitions dans le domaine de la défense ; (2) un instrument de soutien direct à la capacité de production de munitions appelé « ASAP », d’un montant de 500 millions d’euros. Ce programme investit pour soutenir la montée en puissance des capacités de production de munitions et de missiles. Cela permettra à l'industrie européenne de la défense de porter sa capacité de production de munitions à 2 millions de d'obus par an d'ici 2025.
Ces deux instruments travaillent en synergie avec la facilité européenne pour la paix, qui a déjà démontré son rôle décisif dans le soutien au transfert d’armes vers l’Ukraine.
Investir mieux, investir ensemble et investir européen : toute première stratégie industrielle de défense et nouveau programme pour l'industrie de la défense
Avec la résurgence d’un conflit de forte intensité sur notre continent, l’Europe ne pouvait plus attendre pour renforcer la capacité de la base industrielle et technologique de défense européenne à produire plus et plus rapidement. Il était temps pour l'UE de passer de ces réponses d'urgence ad hoc avec EDIRPA et ASAP, au renforcement durable de l’industrie européenne dans le domaine de la défense. Pour y parvenir, il faut une industrie de la défense de l'UE plus forte et réactive.
C’est pourquoi la Commission européenne a présenté le 5 mars 2024 la première stratégie industrielle européenne de défense, accompagnée d’un programme européen d’investissement dans ce domaine. Les États membres doivent investir plus, mieux, ensemble et dans des équipements européens. Afin d'aider les États membres à atteindre ces objectifs, la stratégie industrielle de défense européenne énonce un ensemble de mesures visant à garantir la disponibilité et l’approvisionnement en produits de défense. La stratégie énonce les indicateurs qui doivent servir à mesurer les progrès accomplis par les États membres pour parfaire la préparation de leur industrie. Les États membres sont invités :
- à acquérir au moins 40 % des équipements de défense de manière collaborative d'ici à 2030 ;
- à faire en sorte que, d'ici à 2030, la valeur des échanges commerciaux intra-UE liés à la défense représente au moins 35 % de la valeur du marché de la défense de l'Union ;
- à augmenter régulièrement leurs achats d'équipements de défense au sein de l'UE pour qu'au moins 50 % du budget qui y est consacré soit dépensé dans l'Union à l'horizon 2030 et 60 % à l'horizon 2035.
Les États membres et, en définitive, les citoyens de l'Union seront les bénéficiaires d'une industrie de la défense européenne plus forte et plus réactive. Celle-ci profitera aussi aux principaux partenaires de l'Union, notamment à l'OTAN et bien évidemment à l'Ukraine.
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Détails
- Date de publication
- 23 mai 2024
- Auteur
- Représentation en France