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Représentation en France
Discours23 mars 2022Représentation en France

Discours de la Présidente von der Leyen à la plénière du Parlement européen sur la préparation de la réunion du Conseil européen des 24 et 25 mars 2022

Seul le texte prononcé fait foi.

Participation of Ursula von der Leyen, President of the European Commission, to the plenary session of the EP

Je vous remercie, Madame la Présidente,

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Députés,

Chaque jour, nous voyons avec effroi les images qui nous parviennent des villes ukrainiennes assiégées, la destruction de Marioupol, de Kharkiv et de la banlieue de Kiev. Mais permettez-moi de vous emmener un instant au-delà de la ligne de front, dans l'Ukraine occupée. Après les sièges et les bombardements, la réalité de l'occupation n'est pas moins terrifiante. Pouvoir manger des aliments frais est devenu un luxe. Les hôpitaux et les pharmacies sont pratiquement à court de médicaments. Des centaines de personnes sont détenues par les forces d'occupation russes. Malgré cela, pourtant, des milliers d'Ukrainiens continuent tous les jours de manifester contre l'invasion. À Kherson, à Berdiansk, à Melitopol, ils agitent leurs drapeaux bleus et jaunes devant l'occupant russe. Et ils n'ont pas renoncé, même après que ces soldats les ont frappés et qu'ils ont abattu certains d'entre eux. Mesdames et Messieurs les Députés, si la liberté a un nom, elle s'appelle Ukraine. Et le drapeau ukrainien est aujourd'hui l'étendard de la liberté.

Tous nos efforts à l'heure actuelle visent à faire de cette guerre un échec stratégique pour Poutine. C'est pourquoi les États membres ont convenu d'allouer 1 milliard d'euros d'assistance en matière de sécurité aux courageux combattants ukrainiens. Mais pour soutenir l'Ukraine, il faut aussi assécher les ressources qu'utilise Poutine pour financer son atroce guerre. La semaine dernière, nous avons adopté un quatrième ensemble de sanctions sans précédent. Nous refusons à la Russie le statut de « nation la plus favorisée » dans les échanges et nous restreignons fortement son accès à nos marchés. En effet, la Russie ne doit pas tirer profit de cet ordre fondé sur des règles qu'elle viole de manière aussi évidente. Nous mettons fin à tout nouvel investissement européen dans l'ensemble du secteur russe de l'énergie. Parce que nous ne devons pas renforcer la dépendance énergétique dont nous voulons nous défaire. Nous continuons d'exercer des pressions sur les élites russes proches de Poutine en saisissant leurs yachts, leurs villas de prestige et leurs voitures de luxe. Parce que ceux qui soutiennent la guerre de Poutine ne doivent pas pouvoir jouir tranquillement de leur grand train de vie alors que les bombes pleuvent sur l'Ukraine. 

Ces mesures viennent s'ajouter à trois autres ensembles de sanctions. Elles font déjà des dégâts importants dans l'économie russe. Le rouble n'a jamais été aussi faible qu'au début de ce mois. Les taux d'intérêt dépassent les 20 %. Les agences de notation ont déclassé les obligations russes au statut d'obligations à haut risque. Des centaines d'entreprises de taille mondiale quittent la Russie parce qu'elles ne souhaitent pas alimenter la guerre décidée par Poutine. Voilà, Mesdames et Messieurs les Députés, l'héritage que Poutine laissera à la Russie. Il est également devenu le pire ennemi du peuple russe. Mais surtout, il est responsable de la tragédie humaine qui se déroule en Ukraine. À ce jour, plus de trois millions de personnes ont quitté l'Ukraine. La moitié d'entre elles sont des enfants. Chaque seconde, un enfant en provenance d'Ukraine arrive dans notre Union. Chaque seconde. Donc, au moment où je vous parle, ici au cœur de la démocratie européenne, 800 enfants quittent l'Ukraine – ils sont courageux, traumatisés et ils ont besoin d'aide. Ils laissent derrière eux leurs frères et leurs pères, ne sachant s'ils les reverront un jour. Et cela fait chaud au cœur de voir l'élan de solidarité qui se forme dans toute l'Europe pour nos amis ukrainiens. J'applaudis l'immense générosité de tous les Européens, de tous les États membres et de la Moldavie. Au niveau européen, nous allons mobiliser des ressources massives pour soutenir les États membres qui accueillent des personnes fuyant la guerre. Nous avons fait en sorte que les fonds de développement régional et de cohésion ainsi que REACT-EU puissent être utilisés avec la plus grande souplesse, afin que les villes et les régions puissent investir dans des écoles, des logements et dans les soins de santé. Je vous remercie de tout mon cœur pour votre soutien. Nous venons de le voir, près de 17 milliards d'euros sont déjà mobilisés grâce à vous. Un grand merci à vous tous! Toutefois, je pense que ce n'est pas assez. Nous proposons à présent d'accélérer le versement anticipé de 3,4 milliards d'euros en liquidité à ceux de nos États membres qui font preuve d'une solidarité si exceptionnelle. Je compte sur vous, Mesdames et Messieurs les Députés, pour donner sans délai le feu vert à ces transferts. Vous enverrez ainsi un signal fort de notre engagement commun en faveur du peuple ukrainien.

Mesdames et Messieurs les Députés,

Nous devrions être lucides sur ce qui nous attend. Notre continent est actuellement secoué par un bouleversement tectonique qui n'a pas été observé depuis la chute du Mur de Berlin. Les conséquences de cette guerre sur l'architecture de sécurité de l'Europe seront considérables. Et je ne parle pas seulement de la sécurité sur le plan militaire. La sécurité énergétique et même la sécurité alimentaire sont, elles aussi, en jeu. Permettez-moi de commencer par la question de l'énergie. Qui dit politique énergétique, dit politique de sécurité. C'est la raison pour laquelle la Commission a proposé des mesures qui nous permettraient de réduire sensiblement nos importations de gaz en provenance de Russie. C'est un projet très ambitieux, mais nous pouvons y arriver. Nous avons déjà clairement tracé la voie pour y parvenir, nous passons à présent à la vitesse supérieure. Grâce à notre nouvelle proposition, REPowerEU, nous pouvons hâter encore davantage cette transition. Premièrement, en accélérant les projets dans le domaine des énergies renouvelables - il s'agit d'un investissement stratégique dans notre sécurité - , y compris l'hydrogène et le biogaz. Deuxièmement, en accélérant les investissements dans l'efficacité énergétique. Chacun peut contribuer à réduire notre dépendance à l'égard du gaz russe. Et troisièmement, en diversifiant notre approvisionnement en gaz, en délaissant le gaz russe pour nous nous tourner vers des fournisseurs fiables. Demain, je discuterai avec le président Biden des modalités permettant de donner la priorité, dans les mois à venir, aux livraisons de GNL des États-Unis à destination de l'Union européenne. Nous avons l'intention d'obtenir un engagement pour des approvisionnements supplémentaires couvrant les deux prochains hivers. 

Mesdames et Messieurs les Députés,

Nous sommes plus forts lorsque nous mobilisons le pouvoir de notre marché unique et faisons preuve de solidarité. Dans cet esprit, nous venons de présenter des propositions qui visent à s'attaquer conjointement à l'une des causes profondes de la crise énergétique que nous traversons : les prix élevés et volatils du gaz. Nous proposons un système commun de passation de marchés pour le gaz et des règles plus strictes en matière de stockage. Parce qu'au lieu de nous livrer à une surenchère et de faire monter les prix, nous devrions peser de tout notre poids et nous mettre à acheter du gaz ensemble, en tant qu'Européens, pas comme 27 États membres différents. Nous devrions, en outre, utiliser nos installations de stockage de gaz se trouvant dans certains États membres pour sécuriser l'approvisionnement en gaz partout dans l'Union. Cela profitera non seulement aux États membres dans lesquels ces réservoirs sont situés, mais aussi à leurs voisins. Prenez l'exemple des États baltes. La Lituanie possède l'un des plus grands terminaux GNL de la région, tandis que la Lettonie peut se targuer de disposer de vastes installations souterraines de stockage. Ainsi, dès aujourd'hui, le gaz liquéfié GNL arrivant à Klaipėda est utilisé pour remplir les installations de stockage en Lettonie. Et, bien entendu, les clients de l'Estonie voisine en bénéficient également. C'est la voie à suivre.

J'ajouterai pour terminer que les effets de la guerre menée par la Russie ne se limitent évidemment pas au domaine de l'énergie. Ces effets perturbent également les approvisionnements en produits alimentaires essentiels et font grimper les prix des denrées alimentaires. L'Union européenne a alloué pas moins de 2,5 milliards d'euros jusqu'en 2024 pour aider les régions du monde aux prises avec l'insécurité alimentaire. Et ce matin, nous avons décidé de toute une série de mesures spéciales pour venir en aide aux agriculteurs européens. Nous présenterons un train de mesures de soutien d'un montant de 500 millions d'euros à l'intention des personnes les plus touchées par la crise. N'oublions pas que l'Ukraine fournit, à elle seule, plus de la moitié des stocks de blé du Programme alimentaire mondial. Les bombardements et les pilonnages empêchent les agriculteurs ukrainiens de semer. Qui plus est, Poutine bloque, en mer Noire, des centaines de navires transportant du blé. Les conséquences de cette guerre se feront donc sentir du Liban, de l'Égypte et de la Tunisie, en passant par l'Afrique, jusqu'en Extrême-Orient. J'appelle Poutine à laisser passer ces navires. Faute de quoi, il sera responsable non seulement d'une guerre et de la mort de nombreuses personnes, mais aussi d'une disette et d'une famine.

Mesdames et Messieurs les Députés,

Ce soir, cela fera un mois que l'invasion russe aura débuté. Depuis le tout premier jour, l'Europe est restée unie, a fait bloc. Continuons ainsi. S'il y a bien une chose que Poutine n'aura pas anticipée, c'est notre unité, la rapidité de notre action et notre détermination. Poutine doit être pleinement conscient de ce que nous maintiendrons le cap. 

Vive l'unité ! Et vive l'Europe !  

Détails

Date de publication
23 mars 2022
Auteur
Représentation en France