Discours de la Présidente von der Leyen lors de la conférence de haut niveau sur le Socle européen des droits sociaux

Madame la Présidente Metsola,

Monsieur le Vice-Premier ministre Vandenbroucke,

Monsieur le Vice-Premier ministre Dermagne,

Monsieur le Président Röpke, cher Oliver,

Enrico Letta,

Cher Commissaire Schmit, cher Nicolas,

Chers représentants des organisations syndicales et des associations professionnelles,

Mesdames et messieurs,

Qu'est-ce qui fait de l'Europe en particulier un endroit où il fait aussi bon vivre et travailler ? Ce n'est pas seulement la splendeur des villes telles que Gand ou Dinant, le génie d'artistes tels que Magritte, ou la beauté des forêts luxuriantes comme celle qui nous entoure. C'est aussi notre mode de vie européen. Notre équité et notre compétitivité, qui reposent sur notre économie sociale de marché et sur des décennies de dialogue social. L'Europe est exceptionnelle en raison de ses syndicats, tels ces mineurs belges qui se sont battus pour la santé et la sécurité au travail après la tragédie de Marcinelle. L'Europe est exceptionnelle en raison de ses entrepreneurs éclairés, je pense notamment à Ernest Solvay, qui, dès le 19^e siècle, finançait l'enseignement supérieur, et accordait des droits sans précédent à ses travailleurs. L'Europe est exceptionnelle en raison de figures de la société civile comme Marie Popelin, première femme belge diplômée en droit, qui batailla toute sa vie pour que les femmes puissent accéder au barreau.

L'Europe telle que nous la connaissons ne s'est pas faite en un jour. Nous sommes les héritiers d'une longue histoire de progrès sociaux, de convergence et de dialogue social. Nous sommes également les héritiers de dirigeants visionnaires qui ont placé la dimension sociale au cœur de notre Union. Tel le regretté Jacques Delors. Et mon ami Jean-Claude Juncker, qui a été le moteur de la mise en place du Socle européen des droits sociaux. Cette longue histoire se poursuit aujourd'hui. Ici même à La Hulpe, nous nous engageons à nouveau en faveur des fondements du socle européen : l'égalité des chances pour tous, des conditions de travail équitables, la protection et l'inclusion sociales. Voilà les valeurs de notre économie sociale de marché. Et nous devons continuer à les faire vivre.

Mesdames et messieurs,

Au début de ce mandat, nous avions promis de mettre en œuvre le Socle européen des droits sociaux tout juste créé. Nous ne savions pas ce qui nous attendait. Deux crises d'une ampleur historique. La crise sanitaire de la COVID-19, puis la guerre en Ukraine, accompagnée d'une crise énergétique « made-in-Russia ». Elles auraient pu engendrer une crise sociale dramatique. Mais cela n'a pas été le cas. Grâce à la grande résilience des citoyens européens. Mais aussi parce que nous avons mis en place les politiques qu'il fallait. En commençant par SURE, qui a sauvé des millions d'emplois au plus fort de la pandémie. Puis NextGenerationEU et REPowerEU, qui ont accéléré la reprise ainsi que le déploiement d'énergies renouvelables produites localement. Il est facile d'oublier une crise qui n'a jamais eu lieu. Mais je n'ai pas oublié que beaucoup avaient prédit un chômage de masse en Europe à cause des confinements. Au lieu de cela, davantage de personnes ont aujourd'hui un emploi qu'à n'importe quel autre moment de l'histoire européenne. Plus de 75% des Européens ont un emploi. Un chiffre proche de notre objectif de 78% d'ici 2030. Comment cela est-il possible ? Parce que nous avons mis en place des politiques économiques saines fortement axées sur le social. Notre Union doit répondre aux besoins des citoyens et des entreprises.

Nous avons montré qu'il ne saurait y avoir de croissance économique sans croissance sociale. Et le progrès social ne peut être durable que s'il repose sur la réussite économique. Au début du mandat, nous avons proposé de nouvelles initiatives dans le cadre de notre Plan d'action sur le Socle européen des droits sociaux. Et malgré toutes les urgences auxquelles nous avons dû faire face, nous sommes en bonne voie pour honorer chacun de nos engagements d'ici à la fin du mandat. Nous avons réussi à adopter la Directive relative à des salaires minimaux adéquats, la garantie pour l‘enfance, afin que tous les enfants qui en ont besoin aient accès à une éducation et à des soins de qualité, la Directive sur la présence des femmes dans les conseils d'administration, après dix années de blocage, la Déclaration de Val Duchesse pour renforcer le dialogue social et la directive relative au travail via une plateforme, qui protège les droits dans l'économie numérique. On voit là l'économie sociale de marché en Europe en action.

Et cet esprit doit continuer de nous guider en cette période de transition pour nos institutions européennes. Il est essentiel que les échanges se poursuivent, entre toutes les parties, sur la manière de façonner la dimension sociale de notre Union. Durant ces deux journées, vous avez entendu Mario Draghi et Enrico Letta évoquer les défis qui se posent pour notre compétitivité et notre marché unique. Leurs rapports, de même que la déclaration que nous nous apprêtons à signer, nous montrent la voie à suivre. Dans les cinq années à venir, nous devons conforter la supériorité de notre Union en tant que lieu où vivre et faire des affaires avec une main-d'œuvre qualifiée, avec des entreprises innovantes, avec un bouquet énergétique durable, avec des règles et des droits dans le domaine de l'intelligence artificielle, avec des perspectives et des garde-fous, pour les jeunes et les moins jeunes. Car c'est cela qui rend notre Union exceptionnelle. C'est cela qui fait de l'Europe le continent de nos rêves. On peut faire des affaires dans le monde entier. On peut faire du profit partout. Mais où souhaite-t-on élever ses enfants ? Là où il existe des chances pour tous. Où on trouve éducation et culture. Où on peut se déplacer, étudier et travailler à travers des frontières qui n'existent plus. Où les électeurs et les partenaires sociaux sont aux commandes. Où vous êtes libres de rayonner et où chacun est protégé contre les grands risques de la vie. C'est cela, notre Europe sociale. Ce sont les valeurs dont nous avons hérité. Et c'est là l'Union que nous bâtissons ensemble, à l'intention de la prochaine génération.

Merci et vive l'Europe.