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Représentation en France
  • Discours
  • 9 mai 2022
  • Représentation en France
  • 9 min de lecture

Discours de la Présidente von der Leyen lors de la séance de clôture de la Conférence sur l'avenir de l'Europe

Seul le texte prononcé fait foi.

Participation of Ursula von der Leyen, President of the European Commission, in the closing ceremony of the conference on the future of Europe

« Nous devons penser et planifier une Europe unie comme si chaque jour il était possible de la créer immédiatement, rejetant la lassitude de ceux qui la renvoient toujours à demain. Le possible, s'il est vraiment possible, nous pouvons commencer à le réaliser aujourd'hui. »

Madame la Présidente,

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

En cette journée si particulière pour l'Europe, je ne pouvais trouver meilleure introduction que les mots d'Ursula Hirschmann. Pour ceux qui ne connaissent pas son histoire, Ursula Hirschmann a été l'une des architectes et des bâtisseuses de l'Europe libre et unie d'aujourd'hui. Elle a résisté à la montée du nazisme à Berlin dans les années 1930 – elle a façonné l'avenir de l'Europe sur l'île de Ventotene dans les années 1940 – et elle a été l'une des pionnières des droits des femmes pour toute notre Union.

Le courage qu'elle a manifesté dans ses actes et ses convictions a contribué à faire de l'Europe ce qu'elle est aujourd'hui. Je voulais commence par évoquer sa personnalité parce que la réflexion sur l'avenir de notre Europe a toujours fait appel à la mémoire de son passé. Cette mémoire est d'autant plus importante à un moment où notre continent est de nouveau confronté à l'impensable. Les tentatives flagrantes de la Russie de redessiner les cartes et de réécrire même les épisodes les plus tragiques de notre histoire nous ont rappelé le danger qu'il y a de relâcher la maîtrise aussi bien de notre passé que de notre avenir. De vivre dans un perpétuel présent et de croire que les choses ne peuvent jamais évoluer. Qu'il ne peut exister de meilleures façons de faire les choses. Et, plus grave encore: que les choses resteront toujours inchangées, à condition que nous ne changions pas. On ne pourrait pas se tromper davantage! Rester immobile, c'est reculer.

Mais cette Conférence nous a montré que les Européens sont déterminés à ne pas commettre cette erreur. Vous nous avez dit que vous voulez construire un avenir meilleur en honorant les promesses les plus persistantes du passé. Les promesses de paix et de prospérité, d'équité et de progrès; d'une Europe sociale et durable, bienveillante et audacieuse. Tout comme Ursula Hirschmann et tous ceux qui nous ont précédés.

Mesdames et Messieurs,

Cette Conférence s'est prononcée clairement. Et je suis ravie de vous voir si nombreux ici aujourd'hui. Par vos 49 propositions et plus de 300 mesures, vous avez tissé et élaboré la vision d'une Europe qui agit sur les aspects qui comptent le plus, qui contribue à améliorer le quotidien, qui ne limite pas son action à un seul lieu mais est à vos côtés lorsque vous en avez besoin. Sur les priorités quotidiennes — comme l'air que nous respirons et la nourriture que nous mangeons, l'éducation que nous donnons à nos enfants et les logements dans lesquels nous les aidons à grandir.

C'est la vision d'une Europe qui met en commun ses forces et sa diversité pour relever les plus grands défis — du changement climatique à la perte de la nature, en passant par les pandémies ou la sécurité dans notre région du monde. Une Europe dotée de capacités renforcées pour faire vivre et défendre ses valeurs et l'état de droit. Une Europe capable de subvenir à ses besoins dans les domaines vitaux, qu'il s'agisse de l'énergie, de l'alimentation, des matériaux et des médicaments, des puces numériques ou des technologies vertes. Une Europe qui assure une protection et des avantages sociaux uniques tout au long de ces transitions majeures.

Mesdames et Messieurs,

Je m'adresse à chacun d'entre vous qui avez participé à cette Conférence: votre message a été reçu. Et il est désormais temps d'agir. C'est ce que j'avais promis lorsque je m'étais présentée comme candidate devant cette même Assemblée il y a deux ans et demi. Et ensemble, nous avons prouvé que nous pouvions le faire en nous appuyant uniquement sur les compétences existantes — même lors d'une pandémie ou d'une guerre. Qu'il s'agisse d'acheter des milliards de vaccins pour l'ensemble des Européens, ou de donner le coup d'envoi de l'économie du futur grâce à NextGenerationEU. Qu'il s'agisse de définir une voie ambitieuse et juridiquement contraignante vers la neutralité climatique, de fixer les règles du jeu dans le monde numérique ou d'aider les petites entreprises à conserver leur personnel pendant la pandémie.

Rien de tout cela n'était explicitement prévu dans le traité, mais c'était possible. Et nous l'avons fait ensemble – parce que les Européens comptaient sur une montée en puissance de leur Union. Et vous pouvez compter sur moi pour continuer à repousser les limites afin de faire avancer les choses — exactement comme vous nous avez demandé de le faire dans ce rapport. Dès le mois prochain, nous allons déterminer ce qui est nécessaire pour donner vie à vos propositions et y répondre le mieux possible. Dans certains domaines, vos propositions nous incitent à accélérer les travaux déjà en cours, par exemple sur le pacte vert pour l'Europe ou pour renforcer l'équité sociale. Cela suppose donc d'accélérer les négociations sur le paquet «Ajustement à l'objectif 55» afin que nous puissions stimuler les énergies renouvelables, économiser l'énergie et abandonner les combustibles fossiles. Cela implique aussi d'agir pour que notre proposition relative aux salaires minimaux acquière force de loi, pour rendre le travail financièrement attrayant pour tous.

Dans d'autres domaines, nous avons déjà entamé le travail que vous demandez. Par exemple, dans les semaines et les mois à venir, nous présenterons des propositions visant à restaurer la nature ou à réduire les déchets d'emballages. Nous agirons pour interdire l'entrée sur le marché de l'UE de produits issus du travail forcé et formulerons des recommandations aux États membres en ce qui concerne le revenu minimum. Sur toutes ces initiatives à venir, nous examinerons de près vos propositions afin de répondre au mieux à vos demandes.

Sur de nombreux points, nous pouvons agir sans retard. Et cela vaut aussi pour les recommandations qui nous amèneront à prendre de nouvelles mesures. Pour assurer un suivi rapide, j'annoncerai les premières nouvelles propositions en réponse à votre rapport dans mon discours sur l'état de l'Union en septembre. Cependant, en plus de tout cela, il nous faudra encore aller de l'avant. Par exemple, j'ai toujours soutenu que le vote à l'unanimité dans certains domaines clés n'a tout simplement plus de sens, si nous voulons être en mesure de progresser plus rapidement. Ou que l'Europe devrait jouer un rôle plus important, par exemple dans les domaines de la santé ou de la défense. Et nous devons améliorer le fonctionnement de notre démocratie sur une base permanente. Que ceci soit clair: je serai toujours du côté de ceux qui souhaitent réformer l'Union européenne afin qu'elle fonctionne mieux.

En effet, vous nous avez dit à quel endroit l'Europe doit arriver. À nous maintenant de prendre le chemin le plus direct pour nous y rendre, en exploitant au maximum toutes les possibilités que nous offrent les traités — et, oui, en modifiant ces traités lorsque cela est nécessaire. Je me félicite que, pour la première fois dans son histoire, le Parlement européen soit prêt à utiliser son pouvoir de proposer une Convention. Travaillons tous ensemble à ce projet. Sans tabous. Sans lignes rouges idéologiques. Travaillons pour l'ici et maintenant.

Mesdames et Messieurs,

«La démocratie n'est pas démodée, mais elle doit se renouveler pour continuer à améliorer la vie des gens». Ce sont les paroles prononcées par David Sassoli — un grand Européen qui se tenait ici même, il y a un an de cela, pour lancer cette Conférence. Il nous manque beaucoup à tous, et il occupe une place spéciale dans mon cœur aujourd'hui.

Et je suis fière que des citoyens de toute l'Europe aient donné vie à sa vision d'une démocratie européenne dynamique et moderne. Nous l'avons vue se manifester dans les Panels de citoyens nationaux, comme ceux qui se sont tenus partout en France. Et nous l'avons vue se manifester dans les Panels de citoyens européens — de Dublin à Natolin, de Florence à Maastricht. Cette démocratie a réuni des hommes et des femmes qui n'avaient jamais eu cette relation avec l'Europe auparavant. Des histoires différentes, des langues différentes, des identités différentes; un avenir partagé à construire ensemble.

Vous avez prouvé que cette forme de démocratie fonctionne. Et je crois fermement qu'elle doit être intégrée dans notre travail politique. C'est pourquoi je proposerai qu'à l'avenir, nous accordions aux Panels de citoyens le temps et les ressources nécessaires pour formuler des recommandations avant que nous présentions certaines propositions législatives essentielles. Parce que la démocratie ne se résume pas aux élections, aux conférences ou aux conventions. Elle doit être travaillée, entretenue et améliorée chaque jour. Nous l'avons constaté dans ces manifestations participatives qui se sont déroulées dans toute l'Europe. Qu'il s'agisse de débattre de la biodiversité à Varna, de la violence sexiste à Lisbonne ou de la démocratie et de la subsidiarité à Budapest. Et nous l'avons vu dans l'image de Linda, une jeune mère parlant du futur dans cet hémicycle en tenant dans ses bras son bébé, né à mi-chemin de la Conférence.

Mesdames et Messieurs,

C'est cette image que je veux que nous célébrions le 9 mai. Une image beaucoup plus puissante que n'importe quel défilé militaire parcourant les rues de Moscou au moment où nous parlons. Une image qui nous rappelle de ne jamais tenir pour acquis ce qu'est l'Europe et ce qu'elle signifie. L'Europe est un rêve. Un rêve qui a toujours été. Un rêve né d'une tragédie.

Mais aujourd'hui, ce rêve brille au plus fort, non seulement ici, dans ce lieu historique. Il brille au plus fort dans les cœurs et les esprits des gens de Kiev et de Kharkiv, d'Odessa et de Poltava, de Marioupol et de Mykolaiv. Il brille au plus fort dans le courage de ces familles et de ces jeunes gens terrés dans les métros et les sous-sols; de ceux qui pleurent les atrocités insensées, les violences aveugles commises à Boutcha, à Irpin et dans tous les villages et villes ukrainiens frappés par la guerre. Et il brille au plus fort dans les yeux de tous ces jeunes Ukrainiens qui ont trouvé un refuge en Europe — une maison loin de chez eux. Tous ces gens — jeunes et vieux — sont prêts à se battre et à mourir pour leur futur et pour ce rêve d'Europe. Ce rêve qui a toujours été. Ce rêve qui doit être toujours.

Je voudrais donc terminer cette intervention par un message spécial à nos amis, à notre famille ukrainienne. Le futur de l'Europe est aussi votre futur. Le futur de notre démocratie est le futur de votre démocratie. Il y a 72 ans, la guerre en Europe a été remplacée par quelque chose de différent, quelque chose de nouveau. D'abord une Communauté, puis une Union. C'était le jour où le futur a commencé. C'est un futur que nous écrivons ensemble depuis lors — en tant qu'architectes et bâtisseurs de l'Europe. Et la page suivante est en train d'être écrite par vous. Par nous. Par nous tous ensemble.

Slava Ukraini. Longue vie à l'Europe.

Détails

Date de publication
9 mai 2022
Auteur
Représentation en France