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Représentation en France
Article d’actualité21 décembre 2023Représentation en France

Les sanctions contre la Russie fonctionnent

Face à la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine et aux multiples sanctions qui ont été prises contre la Russie depuis février 2022, beaucoup se demandent si les sanctions européennes contre la Russie sont efficaces. La réponse est oui ! Les sanctions adoptées par l’Union européenne et ses partenaires frappent déjà durement la Russie. Et leurs effets sur l’économie russe continueront à se faire sentir ! 

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, l’Union européenne a adopté douze séries de sanctions historiques, afin de mener à la désescalade et obtenir le retrait des forces russes. Ces mesures restrictives visent déjà près de 1800 personnes et entités au total en Russie, ainsi que de nombreux secteurs clés de l’économie russe. Le 12ème paquet de sanctions adopté mi-décembre 2023 comprend notamment de nouvelles interdictions d'importation et d'exportation, et des mesures visant à lutter contre le contournement du plafond des prix du pétrole. La lutte contre le contournement des sanctions de l'UE se renforce en parallèle, notamment grâce à l’action de l’Envoyé spécial international pour la mise en œuvre des sanctions de l'UE, David O’Sullivan. 

Berlaymont building illuminated in blue and yellow in support of Ukraine

Au niveau des revenus, nous estimons que l'État russe a probablement 400 milliards d'euros de moins à dépenser. Il était traditionnellement en excédent budgétaire, au niveau de ses dépenses publiques. Aujourd'hui, il accuse un déficit de 2 à 3%. Certes, l'économie russe connaît une légère croissance. Mais il faut regarder de près pourquoi c'est le cas. C'est parce que l'État russe investit massivement dans son armée. 30% des dépenses publiques russes sont aujourd'hui consacrées à l'armée, soit près de 10% du PIB. Si vous mettez votre économie sur le pied de guerre, vous pouvez bien sûr tout réorienter vers l'armée, mais vous cannibalisez l'économie. Il n'y a pas d'investissement dans la protection sociale, l'éducation, la santé, la recherche. Donc le pronostic pour l'économie russe - et c'est là, le troisième objectif, à savoir de réduire sa capacité industrielle - n'est pas bon

David O’Sullivan, envoyé spécial international pour la mise en oeuvre des sanctions de l'UE, 13 décembre 2023 

Un embargo pétrolier progressif, une limitation du prix du baril et une réduction drastique des importations de gaz russe qui libèrent l’UE de sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie  

L'une des principales sanctions a consisté à réduire de 90 % les approvisionnements en pétrole russe de l'UE dès la fin 2022 par rapport à la moyenne mensuelle des trois dernières années, privant ainsi Moscou de revenus importants.  

Certes, la Russie, deuxième producteur mondial de pétrole, est en mesure de vendre son pétrole sur d'autres marchés, à des pays tiers, ce qui lui permet de continuer à financer cette guerre. Mais cet avantage est limité par le fait que depuis décembre 2022, l’UE et ses partenaires du G7 ont décidé un plafonnement du prix du baril de pétrole à 60 dollars. Cette décision limite les hausses de prix induites par des conditions de marché extraordinaires et réduit considérablement les recettes que la Russie tire du pétrole. Ce plafonnement contribue également à stabiliser les prix mondiaux de l'énergie tout en limitant les conséquences négatives sur l'approvisionnement énergétique des pays tiers. Ce plafond vient s'ajouter à l'embargo de l'UE sur les importations de pétrole brut et de produits pétroliers russes par voie maritime, ainsi qu'aux interdictions imposées par le G7.  

Notre principal objectif est de faire en sorte que les revenus russes soient sévèrement touchés par le plafonnement des prix du pétrole - et nous avons de nombreuses preuves que tel est le cas. En août 2023, les recettes du gouvernement russe provenant de la production et des exportations de pétrole ont été inférieures de 33 % à celles de l’année précédente.

L’UE estime qu'au cours du premier semestre 2023, les revenus pétroliers ont baissé de 50% en Russie. Le plafonnement du prix du baril a pour objectif, il faut le rappeler, non d’exclure la Russie du marché mondial, mais de réduire les bénéfices de ses exportations pour limiter ses ressources qui alimentent la guerre. A terme, l'industrie pétrolière russe souffrira non seulement du départ des opérateurs étrangers, mais aussi de sa difficulté croissante à accéder à des technologies sophistiquées telles que le forage horizontal.

Dernier bénéfice et pas le moindre : cet embargo pétrolier et les efforts pour s’affranchir des importations de gaz russe libèrent l'Europe de sa dépendance énergétique structurelle vis-à-vis de la Russie.  

Les sanctions européennes nuisent-elles vraiment à l'économie russe ?  

Certains observateurs affirment que les sanctions européennes ne sont pas très efficaces car le taux de change du rouble a enregistré des valeurs très élevées à l’été 2022. Mais cette interprétation est douteuse. Le taux de change du rouble reflète simplement le fait que la Russie présente un déséquilibre massif entre le volume élevé des exportations de pétrole et de gaz et l'effondrement parallèle des importations qui a suivi les sanctions. Cet excédent commercial n'est pas un signe de bonne santé économique, surtout pour une économie comme celle de la Russie.  

La dépréciation du rouble, qui a perdu plus de 40% de sa valeur depuis l’été 2022, entraîne également une inflation à cause des coûts plus élevés des produits importés - un phénomène déjà été visible ces derniers mois.  

Bien qu'elle exporte des matières premières non transformées, la Russie doit importer de nombreux produits qu'elle ne fabrique pas. Pour les importations de produits de haute technologie, la Russie dépend de l'Europe à plus de 45%, des États-Unis pour 21% et de la Chine pour seulement 11%. La Russie peut bien sûr tenter de limiter les effets des sanctions en substituant des produits nationaux à ces produits importés. Cela a été fait dans le secteur agricole suite aux sanctions de 2014. En revanche, pour les produits de haute technologie, c'est beaucoup plus difficile à réaliser.  

Les sanctions sur les importations de semi-conducteurs par exemple ont un impact direct sur les entreprises russes qui produisent de l’électroménager, des ordinateurs, des avions, des voitures ou des équipements militaires. Dans ce domaine, qui est évidemment crucial dans la guerre en Ukraine, les sanctions limitent la capacité de la Russie à produire des missiles de précision.   

Le secteur automobile est un autre secteur qui ressent fortement les effets des sanctions. Presque tous les constructeurs étrangers ont décidé de se retirer de Russie et, en mai 2022, la production a diminué de 97 % par rapport à 2021. En outre, les quelques voitures que les constructeurs russes produisent encore ne seront pas équipées d'airbags ou de boîtes de vitesses automatiques. 

Enfin, il y a l'industrie aérienne, qui joue un rôle important dans un pays aussi vaste. Environ 700 des 1 100 avions civils russes sont d'origine étrangère. La Russie devra sacrifier une grande partie de sa flotte, pour trouver des pièces de rechange, afin que les avions restants puissent voler. Même les avions produits en Russie sont dépendants des technologies et du matériel des pays occidentaux. Ainsi, il est estimé aujourd’hui que 95% de la flotte aérienne russe n’est pas en mesure d’être réparée ou entretenue correctement. Et la liste pourrait continuer : perte d'accès aux marchés financiers, exclusion de la Russie des grands réseaux internationaux de recherche (comme le CERN par exemple), fuite massive des cerveaux et des élites russes... L'isolement scientifique, économique et technologique de la Russie constitue une perte majeure pour le pays à moyen terme. 

En ce qui concerne le commerce international, l'alternative offerte par la Chine à l’économie russe reste limitée : alors que ses importations en provenance de Russie ont augmenté (principalement par le biais d'importations énergétiques plus importantes), les exportations chinoises vers la Russie ont diminué dans des proportions comparables à celles des pays occidentaux.  

Ainsi, à moyen terme, les sanctions ont un impact important sur les ressources dont la Russie dispose pour mener la guerre. En 2022, le PIB de la Russie a chuté de plus de 2%, selon les calculs du Fonds monétaire international. 

Les sanctions de l’UE ont déjà limité considérablement les options de Moscou, provoquant des tensions financières, coupant le pays de marchés clés et dégradant considérablement la capacité industrielle et technologique de la Russie. Pour arrêter la guerre, nous devons maintenir le cap

Josep Borrell, Haut Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité (26 août 2023) 

Face à l'invasion de l'Ukraine, l'Union européenne a pris des actions concrètes, déterminée ; à la hauteur de l’évènement et des enjeux. Les sanctions économiques et le soutien à l'Ukraine sont au cœur de cette réponse. L’effet de ces sanctions est visible et il le sera davantage dans les mois à venir. 

Pour en savoir plus

Sanctions de l’UE contre la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine (europa.eu) 

L'Union adopte le 12ème train de sanctions à l'encontre de la Russie (europa.eu) 

Le point sur les sanctions de l'UE contre la Russie - Consilium (europa.eu)Infographie - Incidence des sanctions sur l'économie russe 

David O’Sullivan (europa.eu)* 

David O'Sullivan : "Le pronostic n'est pas bon pour l'économie russe" | Euronews 

Yes, the sanctions against Russia are working | EEAS (europa.eu) 

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Date de publication
21 décembre 2023
Auteur
Représentation en France